Aout 1918 MONTREAL Vol. 1 No 8 Le Numero, 20 Sou■ -SOMMAIRE-No. 8. Aollt 1918 J A.\ t,; .\JORTIER L 'ceuvn de Liszt. )IARCJ,;L -DUG.-Hi leux et Ris L11tfraires. l FERNAND PREFONTAJNE Les styles dans I'ameubJemtnl et la dkoration. I ' LEO-POL ::'IIORIN ...Le Piano --Sa musique -Un interp"1e. R. LAROQUE DE ROQUEBRUNE la jeune filtirature franfaise al,'(ln/ !914. PAUL BRt.;~QT Dialo~e des bites. Ui. mare aux grenouilles. En-tJtes et cufs-de-lampe pilr A. HEBERT et J.-0. DROUIN. Le livre dont on parle est en vente a la LIBRAIRIE C. DEOM 251 rue Ste. Catherine est MONTREAL Depositaire de la revue d'art "LE NIGOG" Musique et broderie fran~a.ise RAOUL VENNAT 642, rue St Den.is Nous faisons toutes les broderies. Nous avons tout ce qui est joli .en musique. TEL. EST 3065 LA PLUS IMPORTANT[ Ll8HA1RI E et PAPETER IE FflANQAISE du CANADA l' on;TPEAL Livres de Classes Fournitures de Classes Articles Religieux Fleurs Artificielles LIBRAIRIE L.•J.•A. 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Personne avant Jui n'avait a ce point lie l'ordhestre au piano; autant Chopin, son rival et son ami, soutire Jes richesses de la musique p0lyphonique pour Jes offrir a son instrument favori, et semble Jes reintegr,er clans cet ecrin, autant Liszt, anime de )'intention contraire, Jes en fait jaillir et depasse constamment le programme qu'on avait totijours assigne au piano pour rejoindre la symphonie et parfois l'egaler. La gloire de Liszt pianiste, son prestige de virtuose exceptionnel, sa 1ongue vie d'homme illustre, la diversite et la fecondite de son ardente existence de pianiste, de compositeur, de critique, de diriecteur de concerts, de chapelles et de theatres, de pretre et d'amoureux, tout cela a donne le change suir sa vraie grandeur ct son vrai role. 11 en avait assez fait, ii avait assez etonne le monde, pour qu'on crut wut fini avec Jui, et certes, c'etait plus qu'il rr'en faut pour compter et rester clans le souvenir admiratif des foules et des elites. Mais on croyait a un meteore: et ii a fa:llu apres la premiere gloire de Liszt suivie d'une periode d'ouhli, lui accorder une seconde gloire, la durable, la reelle, que la premiere cachait et desservait. Liszt pianiste, conseiller et protecreur de Wagner, Liszt chevaleresque, grand seigneur, prodige individuel, c'est le passe. Liszt compositeur, c'est la part imperissable. Je crois qu'il est juste de le considerer comme un grand classique, le digne continuateur de Bach et de Beethoven, autant que comme le plus illustre des ,romantiques de la musique. Liszt a ete, en meme temps que Schumann et Chopin, le fondiateur et ·Je revelateur d'une nouvelle musique de piano, en se ,referant a la meme autorite qu'eux, a J can-Sebastien Bach, II a ete le creaiteur du poeme symphonique en meme temps que Berlioz. II a ete le preparateur du drame wagneden et nous savons tout ce que lui doit Wagner materiellement et moralement, bien que Liszt n'ait jarnais touche au theatre, apart son "Don Sanche", oeuvre de jeunesse. Mais toute symphonic est du theatre comme toute son oetl'Vre pianistique est de la symphonie. Et plus on etudie des compositions comme "Saint Franc;ois de Paule", comme "Mephisto \\'alzer',, comme Jes "Variations sur un psaume de Bach", ou comme la "Sonate" a Schumann, plus on reste convaincu du sens driamatique de Liszt; ii a eu ce sens autant que Jes plus grands dramaturges, et ii a contenu clans son fune tout l'heroisme d'une enorme tragedie interieure. Liszt, au rebours, de Chopin et meme de Schumann, etait trap evidemment ne pour l'orchestre pour considerer le piano comme un instrument individuel et complet. II y a vu la transposition impersonnelle de l'orchestre et tout ce qu'il Jui a adjoint de ressources n'a etc que le moyen de forcer, de surmener la qualite expressive de l'in-strument. La musique de Chopin et de Schumann est com;ue comme si J'orchestre etant appele adisparaitre, le piano devait rester charge de comporter et de rendre tous Jes sentiments musicaux. Par eux ii est un centre, l'instrument-roi. Liszt, tout au contraire, ne fait du piano que l'evocateur de la magie orchestrate. II s'empare de l'instrnment, le dompte, le bouleverse par un ouragan de sonorites, et decouvre en Jui de~ puissances de transcription polyphonique qu'on nc soup,onnait pas. C'est constamment a l'orchestre qu'on songe au dela du clavier; et Jes pretendues jongleries de la virtuosite de Liszt, qu'on attribua longtemps asa puissance personnelle, exceptionnelle jusqu'a etre presque monstrueuse, ne sont en realite que des syntheses rapides et multiples de la polyphonic qu'il entendait en composant. Une oeuvre unique clans la Iitterature du piano, comme la "Sonate", ne peut se comprendre pleinement que dans ce sens. Evidemment, ii y avait une tendance, non pas certes a la jonglerie, mais a l'emphase et a1a grandiloquence, chez Liszt. Et je ne crois pas manq,uer amon respeot pour un maih·e qui m'attire entre tous, en convenant de la justesse de ce reprodhe. Mais, s'il est aise de relever des defauts, ii est autrement interessant de chercher en quoi ils complctent Jes traits d'une psychologie. Je vois que l'emphase de Liszt, outre qu'elle est un cara.otcre general du rornarrtisrne, est due su,rtout a son ardent desir de faire sentir un coloris d'orchestre par un instrument dont la palette est a peine garnie de quelques tons, delicieux d'ailleurs. Ce qui nous scmble emphatique et acrobatique au piano, nous le trouvons nature! et superbe clans l'orchestre de Liszt. Et si Berlioz avait ecrjt poUT le piano, nous en aurions vu bien d'autres, puisque l'orchestre memc ne Jui suffisait pas. Je crois aussi que Liszt ne pouvait s'apercevoir de ce qui nous semble emphatique ou trop pianistique ou trop enjolive, parce <1u'il etait doue par la nature d'une facilite inouie dans le jeu et dans la redaction. Kulle difficulte n'existait pour lllti alors que nous nous acharnons avainore longuement des difficultes redoutables et que nous pensons avec mauvaise humeur: Voila un theme qw ne valait guere la peine d'etre entoure de tant d'obstacles ! ! N'oublions pa~ que pour les doigts de Liszt, ce simple ornement, cette arabesque n'avait aucune importance. S'il eut du se donner beaucoup de mal pour les ccrire et les jouer, assurement ii Jes eut simplifies, preferant travailler sur le fond de !'oeuvre que de raffiner sur les details pianistiques. Du reste, Chopin Jui-meme etait plein de joliesses clans Jes oeuvres destinees au concert, et c'etait la loi de la mode. Et puis, ii est bien difficile de se reteni-r quand on est lance a toute allure dans la composition et l'execution d'une oeuvre comrne !es "Rhapsodies" ou "Mephisto-Walzer", et quand on est un pianiste pareil, on resiste mal au plaisir d'egrener quelques joyaux de plus d'un geste facile, rapide et fastueux, en passant. Mais quand on voit ce qu'est en general la musique ecrite par des pianistes, vraiment on ne peut plus rien dire sur les defauts de celle de Liszt. I1 a trop de couleur, trop de force, trop de choses a dire. C'est un prodigue, soit, mais la pauvrete est le seul defaut irremissible en art. Par Ia on peut dire que Liszt n'a pas cree une ecole technique du piano, mais bien une ecole de transcription, et quand ii a voulu ccrire des transcriptions ii les a realisees avec un ~ens de )'amplification, du 1'"enforcement des timbres qui est bien significatif. Tout pour Jui etait symphonic dramatique, et c'est en quoi ii etait fait pour s'entendre avec Berlioz et \Vagner. Des trois, Wagner fut le seul qui put aborder triom phalement Ia scene, et sans Liszt, ii ne l'eut point fait. Mais une oemnre comme la "Sonate a Schumann", est une tetralogic concentree, OU chantent deja Jes themes essentiels d'un art wagnenen. Et la "Faust-Symphonie" est, avec Je Faust de Schumann, la transcription musicale la plus penet,rante qu'on ait faite de la pensee intime de Goethe; et la "Dante-Symphonie" est une conception d'un caractere strictement tragique, et lorsque je joue Mephisto-Wiai1zer, ii m'est impossible de ne pas penser que j'interprete un fragment de partition d'opera. Tout m'apparait clairement defini sur une scene. J e vois autour du ,rythme de la lourde valse villageoise, les faces brutales des paysans et des violoneux que le demon ensorcelle, et dont ii transforme le na'if plaisir du dimanche en bacchanale affolee. Je vois le souvenir de Marguerite hanter la melancolie desoeuvree de Faust au milieu de cette fete, en une phrase exquisement douloureuse, comme le motif de 1a bien-aimee dans la "Symphonie fantastique" de Berlioz (scene du bal) ; j'apen;ois la silhouette de Mephisto lorsque, apres cette phrase qui defaille, retentit l'eclat du rire satanique qui dechaine tout le finale. On pourrait dessiner tous 1es personnages et le decor, tout est pret, tout parle aux yeux oomme a 1'audition dans ce chef-d'oeuvre. II n'est pas jusqu'a la musrque religieuse de Liszt qui ne demontre ce caractere scenique de son esprit. Elle est, cette musique religieuse, d'une sincere ferveur, d'une haute gravite, d'un style insoup~onnable d'aucune declamation, elle est d'un croyant respectueux et ardent qui, apres avoir pleinement veou la vie passionnelle et glorieuse, revient a la foi comme a la plus be1le volupte de !'a.me. Cependant la colossale "Messe de Grau", le "Christus", les "Preludes", les "Variations sur un psaume de Bach", le "Saint Fran<;ois de Paule", sont des fresques sonores ou se groupent des choeU'rs, ou se devine cons1lamment le heros qui va s'avancer, et tout y vit de la vie dramatique. Jamais le musicien expert dans les plus subtiles combinarsons harmoniques ne vous propose la joie de la sonorite pour la sonorite; tout a un sens intellectuel, comme dans l'oeuv,re de Wagner. Et en cela evidemment la musique de· piano de Liszt est moins riche de substance musicale que ce1le de Chopin, qui ne touche qu'au piano, et de Schumann, dont le genie merveilleux dans 249 le chant et le piano fut gene, desservi, trahi par l'orchestre. Hs avaient bien plus que Liszt le isentiment de la vie interieuTe, de la concentration intime. Cette musique merveilleuse n'est point a elle-meme sa propre fin. II en est de meme dans !es oeuvres purement descriptives et pittoresques ou cet esprit ouvert a tout, a essaye de rendre ses passions, picturales ou Iitteraires. Les "Annees de Pelerinage", evocations italiennes precises comme Jes peintures de Hubert Robert, et lyriques comme Byron, les "Rhapsodies" OU le genie slave £remit et nous apporte son caprice, sa sauvagerie, sa fievre et sa puerilite, tout cela c'est du drame symphonise, c'est une orgie de rythmes. En un mot, on ne peut comprendre le Liszt du piano que comme un explicateur re canadiens, d'aimer le Canada, d'e le serYi.r et de !'honorer. Pourquoi tenez-Y0Us tant a ce que le Canada accomplisse ses destinees ayec de la mauvaise lititerature, quand deja, parmi ceux qui Jui servent de guides, nous rencontrons de si su.rs manieurs de la langue fran~aise? Et je YOUS en prie, en quoi voulez-vous que 'la brouette du fils de M. Bellemare, decrite et celebree en poesie et en prose, parYienne jamais a nous creer une litterature originale? Les symboles nous seraient-ils ajamais defendus? N'aurions-nous jamais la liberte de louer le nez de Cleopiitre, la cuisse de Jupiter d'ou sont descendlues toutes !es creatures, la magnificence de Junon, de celebrer le divin M. Bergeret et ses racines grecques, le galbe d'une Bovary, l'intrepidite de J,ulien Sorel, la langueur d'un Rene et !es aventures de Bubu de Montparnasse? Nous sommes bien malheureux". Et. ce malin, voulant mettre le comble a ses blasphemes, rrteles de verites, osera-t-il encore ces dernieres assertions scandaleuses: "L'argot, puisqu'on tient vraiment a en denicher quelque part, se trouve bien plutot dans ces contes du terroir remplis de canadianismes. (2) Ces termes ne sont pas fran~ais et (1) C'est le malln qui d~golse. (2) Encore une bourde du malin! sont, d'ailleurs, illisibles. Personne en France, sauf pol.llr amusement ou defi, ne songerait a se -traduire en langue ro mane, en fran~ais du quatorzieme siecle. On ne fait plus cela. "Je veux bien que M. Bellemare me nane, en style cana dien, les mesaventures de son fils reYenant de l'ecole, ou autre theme de ce genre. J'y prendrai, peut-etre, quelque plaisir, et tout au plus, cela pourrait me laisser completement indif ferent. Et puis, M. Bellemarre a bien le droit de s'interesser a la brouette de son fils ou a la vache de sa voisine. Pour quoi refuserai-je a M. Bellemare des joies aussi innocentes? De telle.s fraicheurs seront peut-etre capahles de nous rame ner a l'enfance de la 1:erre, et je jure que ce serait aussi drole qu'au-jourd'hui. "Mais nous sommes sans influence sur ces reculs, et notre seule pretention consiste a nous exprimer le mieux possible sur des sujet's que nous avons le droit de choisir, nous aussi, et que nous choisirons." Non, non, nous ITllll'Se.lerons cet audacieux, nous le priverons encore de cette liberte d'aller jusqu'au bout et de conclure ainsi: "Affirmer, pa,r exemple, que M. Paul Morin 4-'exprime en argot parisien pairaitra 1oujours aux yeux d'un homme averti souverainement inepte: ii n'y a pas un iseul mot d'argot dan3 "Le Paon d'email", ni dans "Le Coeur en exil", ni dans "L'Invitation a la vie", etc., etc." Non, no1.16 le forcerons as'abimer dans Jes cri1eres de .M. Letondal, a deguster la nouveaute de sa predication. Nous lui• dirons avec respect: "Prends et !is". "II est evident", ecrit M. Letondal, "que, pour realiser nos aspirations artistiques et "li-tteraires, ii nous faut de plus en plus nous devel.opper au "contact de !'art et de la litterature europeenne, puiser aupres "de la pensee frarn;aise, la clarte, la sobriete et la justesse de I' expression." Nous sommes paTfaitement d'accord, quoique cela soit bien surprenant chez de jeunes barbares. lei, M. Letondal s'assure de plus en plus le chemin de nos coeurs. Notre approbation est complete. M. Letondal s'etonne que ce soit un frarn;ais de Franc.e qui ait ecrit le plus rare roman canadien. Parbleu! nc soyons pas en reste de gentillesse a son egard, et decouvrons-lui tout de suite ce mystere: c'est que, pour M. Hemon, ecrire "Maria Chapdelaine", c'etait tout simplement composer un roman exotique. Je iris bien. Mais avant de laisser ce maitre a penser, em portons, comme un talisman, la conclusion de son ukase qui va nous enlever beaucoup de soucis, tuer en nous des espe rances ambitieuses et nous amener au bercail des bienheureux repos: "Je crois simplement qu'il nous faut avant tout une "litterature honnete pair le metier, sincere d'inspiration, si "celle-ci est profonde et vraie, elle se ressentira totalement de ")'ambiance, de }'atmosphere encore respirable je crois ou nous "avons le bonheur ou le malheur de vivre. La langue, certes, "n'est pas de nous; le metier apoartiendra a qui pourra le "conquerir. II n'y a pas de musique canadienne, pas de lan "gue canadienne au sens rigoureux du mot, soit; mais i~ y a "des sujets canadiens, ii y a l'ame canadienne, }'emotion que "!'on puise dans la communion des choses que ·]'on aime parce "qu'on les connait bien". Bref, ces chicanes nous font grand honneur, puisqu'elles creent en nous -tous !'illusion que nous jouissons encore de la civilisation. Mais elles ne reglent rien, ne fixent pas !es esprits dans de fausses communions sacrees, et sur des levires encore jeunes, permettent au blaspheme de florir. Goutons-en toute la savevr, et selon nos temperaments et nos gouts, saluons des certitudes ou balan<;ons-nous sur des scepticismes. Nous ne demanoons pas mieux que d'av.oir tort si nous en retirons tout profit pour "l'avancement des esprits", "la Kultur superieure", la possession de soi". Un parfait desinteressement nous protege des absolutismes entetes et steriles. Nous attendons le chef-d'oeuvre canadien et Jui preparons des apotheoses. Seulement, nous voulons, pour nous, la liberte des sujets, l'individualisme, la fantaisie, et tout ce qui nous plait, nous amuse et nous empeche de crouler definitivement dans !'ennui. Nos ambitions restent done modestes et nous laissons a des hommes de genie le soin de nous creer une litterature re 257 gionaliste. N'est-ce pas Ia montrer le meilleur des naturels et essayeir de contenter tout le monde. . . et son pere? En verite, no1J1S sommes de bien bons gan;ons. MARCEL DUGAS. P.S.-Avons-nous jamais voulu du ma! a Mademoiselle Michelle LeNormand? Quant a M. Lorrain, ii est plein de mesure, de gout, de moderation. "C'est un sobre et un travailleur". Rien de barnumesque, ma chere! C'est un latin et nous sommes des barbares. Force nous est de renoncer pour jamais ala precision, a !'elegance, a la clarte qui sont Jes vertus des aigles. Nous sornmes des barbares. Pour nous juger avec quelqueequite, nous esp&rons, cependant, avec beaucoup d'indifference, l'homme assez libre de ses preferences, de ses gouts et de "sa mesure", pour permettre aux uns toute la simplicite qu'ils desirent et aux autres les exagerations qu'ils veulent bien commettre. M. D. LES STYLES DANS L'AMEUBLEMENT ET LA DECORATION "Pendant dix-neuf slecles, cbaque "generation avait fa1:onne un mo "blller a son tmage. Nous sommes "arrives au XXieme siecle a tor "'mer le nOtre a !'image de nos "grands-peres." (Henri Clouzot.) La manie de !'imitation des styles ,aaiciens a commence depuis quelques annees aexercer ses ravages clans nos interieurs canadiens. En Firance, d'ou elle nous vient, e1le a fait son apparition vers le milieu du XIXieme siecle et elle a resiste jru.squ'a nos jours, malgre la Jutte acharnee que Jui ont faite tous les vmis artistes. Tout bourgeois frarn;ais qui se respecte doit avoir un salon Louis XV, une salle a manger Hemi II, une bibliotheq_ue Empire et une chambre a coucher Louis XVI ; tout derangement a cet ordire etabli aurait un faux air de blaspheme. Cette habitude est tres commode, le metier des artistes decorateurs est devenu presqu'une sinecure. Aucun besoin de recherches de oouleurs; on marche sur un terrain bien connu, jamais de desappointement pour le client, ii est assure d'avoir une demeure dont l'interieur sera d'une honnete banalite et ne sera depare par aucup_e recherche d'art. Les gens du monde sont devenus tres puristes clans ces questions de styles. Ils ne sauraient pas souffrir clans un salon Louis XV le moindrr-e ch0:ndelier qui ne serait pas clans le style; on fabrique des lustres electriques avec imitations de bougies, pour que rien ne cloche clans !'ensemble; j'ai meme 259 vu des phonographes Louis XV!!. Nous verrons sans doute au Canada des caloriferes Louis XIV. . . a quand Jes moto-cy clettes Henri II ? Pour etre logiques, ces gens du monde devraient aussi n:vetir des costumes en rapport avec leurs ameublements; ce serait peut-etre un peu ennuyeux, car, !es pieces etant meu blees en styles differents, il faudrait pouvoir changer de cos tumes rapidement quand on passerait du salon Regence a la salle amanger Henri II. Pourquoi des hommes senses d'apparence, qui ne vou draient pas voyager en diligence, ni s'edairer a la bougie, ni vivre dans Jes conditions de confort des siecles passes, s'en t&tent-ils a se meubler comme leurs aieux? <;a me semble de !'aberration mentaie. ]'admire beauooup Jes meubles et Jes decorations des siecles qui nous ont precedes. Les artistes, a ces epoques, travaillaient dans un esprit de progres et ils ne cherchaient pas a reproduire exactement Jes oeuvres de leurs peres; ils s'en inspiraient, mais creaient des oeuvres bien personnelles. Si cette ITI:.lllit: d'irn.:;,ti-On des anciens styles etait arrive au XVIIIieme :-iecle, quc:lc cat;,strophe ! nous ne pourrions plus meubler nos b:bF,1'.heques. faute de Style Empire!! C'est un spectacle curieux de voir une epoque comme la notre, qui ne cherche que le progres et la nouveaute, se cramponner avec tant de vigueur a l',a,ncien, en tout ce qui regarde la decoration interieure de nos habitations. On ne veut plus encourager !es artistes ebenistes a creer des oeuvres; on !es contraint a)'imitation servile. Ce n'est pourtant pas la faculte crfatrice de beaute qui manque anotre epoque, on a su faire des locomotives et des IT'..achines outils qui sont de vraies oeuvres d'art. Faudrait--il done aller chercher dans Jes usines et Jes gares les seules ex pressions d'art industricl moderne? Non, ca,r un art decoratif moderne existe. Mais ii est peu connu. J'ai vu a Paris, au salon du mobilier, des meubles tres interessants; je ne parle pas du "Modern style" en faveur vers 1900, cree de toute piece par des esthetes auxquels !'art du meuble etiait absolument inconnu, mais des creations de Maurice Dufrene, de Jallot, de Follot, de Lalique et de tous les artistes qui, s'ins• pirant des meilleurs exemples anciens, continuent la tradition des grands ebenistes des siecles passes. Les Allemands· ont voulu, eux aussi, se degager de cette manie ussy ou de Ravel. Son art est d'une complexite savante et d'une immense reoherche, mais ii semble un jet spontane qui s'elance, toujours vivant, a la rechePche de nourvelles formes sonores. Toutes ces facultes sont un organisme qui depend peut-etre, avant tout, de sa sensibilite, mais a.ussi de son intelligence et qu'il met absolument au service de •!'art. Ricardo Vines, c'est le genie de la resl.ll'rection. C'est Jui qui a revele aplusieurs la grande p-uissance de l'art pianistique contemporain, la magnificence de l'ecritu:re de Ravel et sa portee future. II n'est pas niable, meme, qu'il ait rendu possibles certaines realisations. Son art fot pour plusieurs le point de depaTt de nouvelles conceptions, tant ii possede de cette puissance infinie en suggestions et en realisations. II a ete a plusieurs un exemple. Mais Vines a le merite d'une creation geniale, tandis que d'autres chercheront en vain a l'imiter et a le continuer clans le meme sens. Les 061.1.vres nc se repetent pas semblahles et ii faut ade nouvelles oeuvres de n~uvelles raisons. Un nouveau Vines ce sera !'oeuvre d'une musique differente qui n'est pas encore. LEO-POL MORIN. 267 LA JEUNE LITTERATURE FRAN<;AISE AVANT 1914. Certes, ii n'a pas manque qu'elle soit honoree par l'eloquence cette generation de jcunes heros qui defend la France depuis quatre annees. Des parlementaires, des journalistes, et des litterateurs ont organise autour de ces hommes sublimes, une danse sauvage et hurlante. Ils chantent atue-tete et avec un enthousiasme inalterable et sans pitie tous ceux qui sont morts pour la patrie. Ainsi l'holocauste de toute une j eunesse ne fut pas une suffisante horreur; il ne fut pas assez que I'Europe soit couveiite de p1usieurs mil1lions de cadawes d'hommes robustes et jeunes; ii a fallu assister encore au tournoiement siinstre de tels corbeaux au dessus du charnier, ii a 'fallu ala douleur fraternelle de ceux qui sont epargnes, Ia criaillerie detous ces oiseaux d'eloquence, nourris paT les batailles. Qu'il eut ete de meilleur tact, pourtant, de laisser mourir tous ces hommes dans la stoique horreur de leur sacrifice. Tant de monts de jeunes gens n'auraient du avoir poll'r elegies que Jes pleurs des femmes et le chant des poetes. Mais qu'importent des discours d'hommes officiels et !ouches devant l'oHrande de tant de vies? Comme Jes trois cents j eunes gens des Thermopyles donrt on ignore a jamais 1es noms, Jes milliers de jeunes gens morts pour la France ont une gloire anonyrne et immortelle. II n'est que l'art qui ait desormais quelque droit sur ce souvenir. Mais, s'il ne se Ieve aucun poete pour rappeler gravement le lyrisme de leur vie et J'epique de ~eur mort, qu'ils dOTment dans le silence et clans l'oubli, et 9ue se taisent enfin tous Jes braillards qui s'acharnent sur de si beaux cadavres. * * * Cette jeunesse frarn;aise qu'on ne trouve admirable que parce qu'elle se me\ll'11:, ne recevait pourtant pas !'approbation integrale des vieillards et des etrongers avant la guerre. On en disait du ma! et, meme,. qu'elle manquait de foi et de patrriotisme. Owi,. des hommes pleins d'experience ont pu accuser tous ces Saint-Georges de manquer de foi et de patriotisme. Que ne pouvait-on attendre cependant de la generation qui a fait la guerre? Et quelle admirable France elle eut generee? Deja, elle n'avait voulu dedaigner nulle activite oreatrice, et les activites de l'intelligence, surtout, la passionnaient. La jeunesse litteraire se distinguait particulieirement par sa vitalite et elle n'aurait pas eu une moindre ni une moins forte action que Jes autres groupes de la jeune France sur les destinees du pays et sur son avenir. Elle avait plusieurs maitres et elle se divisait en groupes assez nettement distincts entre ewe. Mais cette tyrannie des maitres ne s'exen;ait que trres largement, car il n',a pas existe de jeunes gens plus epris de liberte d'expression que les jeunes ecrivains et les jeunes poetes de la France d'alors. Le mot d'ecole et ce qu'il represente de systematique et d'etroit semblait a jamais banni d'un pays OU Jes gram.ies ecoles litteraires n'ont cesse de se succeder depuis cent ans. On etait 'fevenu a la divine 1iberte des ages classiques. Et ce gout de la liberte, cette horreuir de l'enregimentement etaient si bien !'instinct de cette generation que M. Jul'es Romains qui avait reuni un groupe de poetes aµtour de lui et qui avait formule une discipline que !'on a appelee l'Unanimisme, se vit presque nie et quasi abandonne par Jes siens chaque fois que fut posee la question des pr.incipes. Et ii semble que ce soit M. Georges Duhamel qui ait formule la plus haute caracteristique de sa generation quand ii a intitule l'un de ses recueils de poemes: Selon ma Loi. Cependant on acceptait avec amour le passe, tous les passes de la litterature franc;aise, mais sans lui permettre d'opprimer le temps present. Nulle esthetique n'avait tant de valeur que la libert:e. Certes, aucun poete ni aucun ecrivain ne voulait oublier que le symbolisme avait ete une me-rveilleuse formule de beaute. Ce be! arbre n'etait pas encO'fe mort, et m.aints jeunes gens venaient s'asseoir et mediter a son ombre. 269 Verlaine planait comme un dieu dans des hauteurs, et Mallarme, Mor6as, Regnier, Viele-Griffin, etc. etaient des ,:lieu'X infiniment respect.es ,et qui crouleraient ave<: le temps plutot que par des mains sacrileges. Le syrnbolisme etait vraiment un temple ou !'on ne venait presgue plus, dont la religion etait presque morte, mais qui etait devenu venerable et sacre. Le fetichisme etait mort; il ne demeurait plus que le respect. Mais il se pouvait reconnaitre des directions mtellectuelles nettement suivies et defendues, car la beaute de cette generation qui dedaigne les inutiles querelles sur la forme, fut d'etre intensement eprise d'idees. Ces esprits avaient accepte des influences ou ils s'etaient acclimates. La noble ambition de servir une grande idee les av~it saisis. II importe peu que ces courants aient ete contradictoires. L'ensemble de la jeunesse litteraire formait quand meme un beau faisceau d'activite, d'energie creatrice. Cela promettait de ne donner rien d'inferieur a la generation de 1885 et a celle de 1830. Maurice Barres, Charles Maurras, Emile Verhaeren, Paul Claude!, Charles-Louis Philippe etaient les moteurs de divers mouvements litteraires. De nombreux esprits echappaient, d'ailleurs, a ces di-rections et n'obeissaient qu'a des regles encore plus largement formulee.5. Mais il est certain que le traditionalisme de Barres et celui de Maurra.s avaient eu un profond echo dans plus d'une ame de jeune homme desireux de se rattacher aux origines de la race, que le sens moderne du lyrisme de Verhaeren avait emu l'imag.ination d'une epoque cprise d'action et de realite, que la simplicite de Philippe, son peu d'intellectualisme avaient plu a des jeunes ecrivains ennemis de tout pedantisme psychologique, que Claude! satisfaisait le christianisme Iitteraire d'un groupe nombreux qui a peut-etre vu dans l'Annonce faite a Marie un nouveau Genie dii Christianisme. II existait a'll.Ssi des personnalites Iitteraires moins lointainement directrices que ces mait-res, plus actuellement actives et d'influence encore plus immediate. Charles Peguy et Jes Cahiers de la Quinzaine, Andre Gide qui.dirigea La Nouvelle Rwue Fmnfaise, Jacques Copea.u qui fonda le theatre du Vieux Colombier, Eugene Montfort qui avait !es Marges, Jules Romains qui groupait W1 des ensembles litterai·res le plus irrteressant, Pierre Lasserre qui avait formule dans un livre injuste et puissant Jes griefs de toute une classe d'esprits contre le romantisme, representaient Jes tendances multiples de la jeune litterature frarn;aise. Ces d.ifferentes sources d'idees prouvent combien l'activite intellectuelle de cette jeunesse etait grande. Un des grands affranchissements de la jeune 1itterature et,ait le large dedain de toute discussion de la forme. Les idees passionnaient ces jet.mes gens, mais ils reconnaissa.ient a chacun le droit de s'exprimer en liberte. Au lieu que le symbolisme, que le Parnasse, que le romantisme de 1830 qui avaient presque exclusivement vecu sur des questions de forme, la jmme litterature frarn;aise etait presqu'exclusivement degagee sous ce rapport de tous les vains prej uges de coterie et de cenacle. Loin qu'ils aient dedaigne la forme, cependant; ils reconnaissaient son exbreme impor>llance en ne Jui reconnaissant mtlle Joi. Ils niaient ainsi qu'il y eut des limites ala fantaisie ou a la force. Chacun s'effor,;ait aune langue ou disciplinee selon une large t•radition ou individualisee selon un verbalisme personnel. Les poetes meme ne soulevaient plus la question perimee du vers libre; ils se contentaient de faire de la poesie. Les grands noms de cette jeunesse litteraire etaient justement Jes plus 3-iberes d'etiquettes. Un GuiUaume Apollinaire par exemple, ne representait rien d'autre que lui-meme. A moins que le gout profond de ce poete pour le pittoresque de !'age actuel, son enthousiasme pour l'etrange et pour l'inhabituel n'aient constitue une veritable direction. Mais le gout du pittoresque, de l'etrange et de 1'inhabituel est profondement romantique. L'admirable fantaisie d'Apollinaire appartient a la tradiition romantique; c'est un descendant authentique de Hugo. Georges Duhamel et Charles Vildrac n'ont guere ete non plus tres etroitement attaches aune fonnule. Sans doute, le poete de Seton ma Loi et celui du Livre d'Amour avaient-ils une grande sympathie avec Ju1es Romains, avec Georges Chennevieres ou P. J. Jouve, mais ils s'en disting,uaient par de perceptibles cotes. De meme Luc Durtain et Rene Arcos 271 qui, en relation avec Jes unanimistes, ne peuvent etre cependant confondus avec eux. La belle formule de l'unanimisme qui veut exposer l'ame collective, l'ame des foules, formule pleine d'ampleur puisque c'est de Walt Whitman, de Zola et de Verhaeren qu'elle decou1le, ne saurait cependant convenir a tous les esprits. D'autres prefereront toujours aux larges ensembles, !es descriptions d'ames et de milieux restreints. "Une famille, une rue, une foule, une ville ce n'est pas seulement quatre, cent, mille, un million d'individus. II y a Ia des etres entierement nouveaux, qui elaborent des faits de conscience enticrement nouveaux", dit Jules Romains. Mais aussi Duhamel: "que l'homme soit de nouveau et pour longtemps l'objet d'W1e immooiate contemplation". Et !'auteur de Selon ma Loi qui est un admirable theoricien de liberte, a proclame partout dans ses Jivres critiques et dans ses articles du Mercure de France, cette divine liberte des ecrivains et des poetes dans leur preoccupation eternelle de l'homme. La seule liberte qu'il ai-t contestee, c'est celle de !'imitation servile, car ii s'insurge con~re ceux qu'i imitent "!es maitres vivants: Claude!, Barres, Gide, Regnier, Viele-Griffin, etc." et ii assure que "la meilIeure fa~on d'admirer ces hommes considerables c'est de ne plus Jes imiter". Fran,;is Carco n'appartient non plus a rien, et son roman de I esus-la-Caille, paru au Mercure de France n'a rien revele qu'une ecriture extremement personnelle et un~ ~elle ,:uriosite psychologique. Julien Benda subirait peut 1 etre 1 mfluience d Anatole France, mais avec un philosophisme entierement a lui. L'Ordination et Les Sentiments de C-ritias re:el~nt une gr~~de personnalite de pensee. Louis Pergaud suiva1t une tra.d1t1on pien delaissee en France, celle de Rabelais. Alfred Machard a imagine d'admirables histoires de gosses. Jean Cocteau 't'epresentait clans Ia jeune litterature un dandysme aimable et plein d'elegance, mais ii n'etait pas que cela car la Danse de Sophocle contient des poemes et un Saint-Sebastien qui sont delicieux. P. J. Toulet dans Mon ami N ane avait etabli un style amusant et fantaisiste. II n'etait pas jusqu'aux critiques comme Duhamel, comme Marcel Coulon, comme Fernand Divoire qui n'aient eu une grande independance de jugement. Les plus systematiques des jeunes gens etaient certainement !es adeptes du mouvement nationaliste et catholique. Mais, pourquoi leur faire grief de cela? D'ailleurs, ils s'intitulaient neo-classiques, ce qui etait charmant et un peu n:iif. Charles Maurras et Maurice Barres furent deux grands magiciens. lls avaient fait boire un philtre a une partie de la jeunesse frarn;aise. !Is n',avaient d'ailleurs aucun sens de la rea:lite, et c'est ce qui plait particulie-rement dans )'oeuvre de M.aurice Barres. Avec Maurras et Barres ces jeunes gens s'etaient donne des maitres magnifiques, fallacieux et charmants. Extremement intellectuels, its meprisaient a leur exemple la Revolution, et defendaient un traditionalisme etroit et hautain. D'esprit extremement calme au fond et d'imagina,tion rest•reinte, ils affectaient un grand amour de !'act.ion, car ils avaient pris a la lettre la boutade de Lasserre qui avait ose ecrire dans le Romantisrne Fran,ais que: "la reverie est servile, vulgaire et languissante". Et, ils meprisaient Jes grands reveu